Au bout du fil, la voix rauque du célèbre chanteur se fait avenante : « Tu le prononces comment ton prénom? » Il est loquace malgré l’océan qui nous sépare – il se trouve en Dordogne. Il est évident que le sujet l’emballe : Richard Desjardins, qui a grandi à Noranda, connait bien les mines et espère que son plus récent film réussira à faire connaitre ce milieu au plus grand nombre. Par contre, pas question de se prêter au jeu des médias et d’y faire la tournée des grands-ducs,  heureusement pour nous il parlera de Trou Story en ces pages.

Trou Story jette la lumière sur l’histoire des mines, sur la mainmise de cette industrie sur le territoire et sa population, sur leur exploitation de la ressource, des travailleurs et de l’environnement. Un film pamphlétaire réalisé avec son complice Robert Monderie, chargé d’images-chocs, d’archives inédites et d’un ton qui leur est propre, dans la lignée de L’Erreur boréale, sur un thème qui est tout aussi cher – sinon plus – à l’Abitibi-Témiscamingue.

L’héritage de L’Erreur boréale

L’idée de traiter des mines découle des répercussions de L’Erreur boréale. Des remous sociétaux qu’avaient causé le documentaire portant sur l’industrie forestière naquirent, entre autres, l’Action boréale (ABAT) et la commission Coulombe. « À l’ABAT, on travaillait à l’instauration d’aires protégées et on les voulait près des communautés pour que les gens en profitent. On s’est aperçus que le territoire était claimé par les minières. C’était dur d’y aménager des zones de protection. C’est là qu’on a compris qu’on ne connaissait pas grand chose des mines et de leur histoire. »

Les deux comparses ont sillonné les terres du bouclier canadien, de Sudbury à Val-d’Or, afin d’en apprendre plus sur ce domaine. Le film présente les réalités et les attitudes des gouvernements, des instances publiques et des populations de part et d’autre de la frontière. « En Ontario, ils sont plus critiques que nous : ici on ne peut pas s’imaginer se braquer contre les mines. Y’a tellement de gens qui en vivent, ou dont la business en dépend que leur silence se comprend. On est plus critiques ailleurs au Québec qu’en Abitibi, mais ils commencent à avoir toute une surprise avec ce qui se passe avec le gaz de schiste. Ils sont en train de découvrir c’est quoi l’industrie minière! » 

Si M. Desjardins rêve de voir l’industrie réformée, il est tout de même réaliste face à la portée de son film et n’envisage pas un aussi grand succès que celui de L’Erreur boréale : « De la forêt, il y en a partout ; les mines sont plus éloignées des villes. »  Et ce même si Trou Story arrive au moment  où le gouvernement s’apprête à réviser sa loi des mines. « On ne veut pas faire fermer les mines, on veut pouvoir, en tant que peuple, avoir préséance sur elles et sur leurs profits! »

Complicité

Richard Desjardins ne tarit pas d’éloges pour Robert Monderie, l’ami avec qui il a réalisé plus d’une demi-douzaine de films. « C’est un vrai plaisir de travailler avec Robert, tellement que des fois je me dis que je fais des films juste pour passer du tempsavec lui », ricane le poète. De cette amitié est né Trou Story, qui sera présenté en première mondiale au FCIAT le 30 octobre, puis dans les cinémas québécois dès le 4 novembre.

> troustory.onf.ca


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