Il était une fois un jeune couple qui, n’en pouvant plus d’habiter à l’ombre des deux immenses cheminées, décida de partir à la recherche de la maison de leurs rêves. Le marché étant ce qu’il est en région, ils durent rapidement se rendre à l’évidence qu’il pourrait s’écouler une éternité avant qu’ils ne trouvent ce qu’ils cherchent. C’est pourquoi, dans un élan de naïveté, ils décidèrent de se construire une maison toute neuve.

 

Ils parvinrent à mettre la main sur un magnifique terrain boisé qu’ils défrichèrent, mais seulement où c’était nécessaire, et s’attaquèrent aux plans de ce qui allait un jour abriter leur famille. Maintenant qu’ils avaient la possibilité de faire exactement ce qu’ils voulaient, plus question de se conformer aux standards du marché. Ils optèrent donc pour une demeure qui cadrait parfaitement avec leur fibre écolo : une maison tenons et mortaises isolée en paille et chauffée par un foyer de masse. Pourquoi pas? Après tout, qui de mieux placés que deux jeunes fringants (et probablement un peu inconscients aussi!) pour se lancer dans un tel projet.

Ce couple c’est nous, et cette maison, nous l’habitons!

Un p’tit peu de nous autres là-dedans
On entend souvent dire qu’en région, tout est à faire, tout est à construire. Eh bien dans notre cas, on a carrément pris ces paroles au pied de la lettre! Et pour ceux qui croient qu’entreprendre une construction écologique en région éloignée complique nécessairement les choses, détrompez-vous. En fait, je dirais même qu’à certains égards, elle les facilite. Je pense entre autres au prix des terres qui sont, heureusement pour nous et contrairement à certaines régions du Québec, encore abordables. Pour ce qui est de l’approvisionnement en matériaux, ou plutôt en matières premières dans notre cas, il s’est fait somme toute assez simplement, et principalement en produits régionaux. Tout le bois de la charpente provient du Témiscamingue et a été transformé à La Motte avec l’aide d’un charpentier traditionnel; la paille provient d’un cultivateur de céréales de Notre-Dame-du-Nord ; l’argile (pour nos crépis et notre plancher) a été recueillie à Rouyn-Noranda ; les pierres de notre foyer viennent de Montbeillard ; et les huiles et pigments naturels sont fabriqués à Mont-Brun. On a même réussi à mettre la main sur des portes et fenêtres récupérées de gens de la place. Bref, quand on cherche, on trouve.

En fait, je serais portée à dire qu’en entreprenant une construction de ce genre, ce n’est pas tellement le lieu qui joue un rôle majeur, mais bien les différents aspects humains qui s’y rattachent. Par moments, il devient presque gênant de recevoir autant d’aide sans jamais pouvoir en redonner autant. La charge de travail est si grande qu’il est parfois tentant de se décourager et de ne plus voir le bout. Les hauts et les bas se succèdent constamment. Il faut dire que de sacrifier la presque totalité de ses loisirs sur une aussi longue période n’est pas chose facile.

Mais le plus ardu demeure probablement d’établir les priorités et un certain équilibre entre la maison… et le temps passé avec les gens qu’on aime! Parce qu’il faut aussi savoir qu’au début du projet, nous n’étions qu’un couple, mais qu’entre-temps, deux enfants ont vu le jour, ce qui change drôlement la donne. Il ne faut donc pas se surprendre en apprenant qu’à quelques heures de l’accouchement, je me trouvais dans les échafauds à tenter d’en faire le plus possible avant l’arrivée du bébé… Et que ce dernier a été bercé tout au long de la grossesse au son des perceuses, mélangeurs et marteaux.
Le temps, le fameux temps, est donc une fois de plus la pierre angulaire de toute cette aventure. Malgré toute l’aide reçue, il se sera écoulé deux ans entre la corvée de charpente et l’emménagement officiel dans notre maison. Et pourtant, le terme «chantier» colle encore parfaitement à l’état actuel de la maison. C’est dire à quel point il s’agit d’un projet de longue haleine ou comme quelqu’un m’a déjà dit : d’un projet de vie!


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