Elle revient de France, de Paris pour être exact, où elle a fait vibrer les spectateurs réunis au Centre culturel canadien, en avant-première de l’événement Les Ailleurs poétiques. Elle en avait fait autant au Nouveau-Brunswick cet été, lors du Festival acadien de poésie de Caraquet. Ceux qui l’ont déjà vue sur scène savent que le choix du verbe « vibrer » pour décrire l’effet que produit cette artiste sur un auditoire n’a rien d’exagéré. Ses mots résonnent, ses mots frappent, qu’ils soient ou non accompagnés d’une musique, car elle est, dans le plus pur sens du terme, une poète!

 

« Elle », c’est Sonia Cotten. Une Abitibienne pure-laine, née à Rouyn-Noranda, à l’ombre des deux cheminées que chante Desjardins. Après un passage dans la grande ville de Morial (comme l’écrit VLB), la voici de retour en région, afin de retrouver ses racines et, par ricochet, se retrouver elle-même. Il suffit de lire son recueil Nique à feu pour deviner que la route n’a pas été facile et qu’elle en a rapporté des cicatrices…

J’avais 18 ans la première fois que j’ai lu des vers de Sonia Cotten. C’était il y a 20 ans! J’étudiais alors la littérature à l’université, et elle rêvait de publier un jour de la poésie. Pour une raison que j’ai oubliée, elle m’avait proposé de lire quelques-uns de ses « travaux littéraires », comme elle les appelait par modestie. Je les ai toujours en ma possession, ces poèmes écrits à la main, sur des feuilles de cartable pliées en quatre; je les conserve comme on garde un trésor. Ce sont les poèmes d’une adolescente, un peu naïfs peut-être, mais beaux, et remplis d’une sensibilité peu commune à cet âge. Ce sont des vers pleins de promesses qui témoignent d’un réel talent. Déjà, à 14 ans, elle changeait le Bronx en or!

Faire place à la poésie
Alors que son recueil de poésie pour enfants arrive en librairie avant d’être lancé sous peu dans cinq villes différentes de la région, je devrais me réjouir de ses succès. Pourtant, je suis inquiet car je sais que es mots sur la feuille, fussent-ils publiés dans un livre ou sur les pages d’une revue, ne suffisent plus : l’artiste qu’est devenue Sonia Cotten a dorénavant besoin d’une scène pour porter sa poésie jusqu’à un public, le sien, et notre région arrive mal à combler ce besoin. Pire, je la soupçonne de se décourager parfois devant les obstacles à surmonter pour « performer » en poésie au nord du 48e parallèle.

Oui, ses vers lui ouvrent maintenant des portes jusqu’en Europe, mais la poésie est-elle condamnée à s’exporter pour vivre ailleurs que sur du papier? À quand un Festival de la poésie émergente (car il n’y a pas que la musique!) ou encore un Festival international de poésie en Abitibi-Témiscamingue (nous n’avons rien à envier à Trois-Rivières, que je sache!) pour permettre à Sonia Cotten et à d’autres comme elle de faire vibrer leurs amis, leur famille, leur monde à eux, ici, chez nous? Rouyn-Noranda, qui souhaite devenir Capitale culturelle du Canada en 2012, devrait peut-être y songer…



Auteur/trice