L’année 2020 a apporté son lot d’imprévus et d’adaptation pour le milieu culturel. En Abitibi-Témiscamingue et ailleurs, les diffuseurs culturels ont redoublé d’ardeur et de créativité pour poursuivre leurs activités, malgré la pandémie de COVID-19. L’Indice bohémien s’est entretenu avec les directions de trois salles de spectacles pour dresser un bilan de cette année inhabituelle. 

 

Si les salles sont rouvertes depuis quelques mois, le défi demeure imposant. « On est toujours en adaptation, réaction, modification, réflexion, tout le temps», affirme Amélie Cordeau, directrice générale du Rift de Ville-Marie. Au début de l’été, elle a entièrement réorganisé sa programmation d’automne, presque tous les spectacles prévus ayant été annulés ou reportés. Même chose du côté de Mathieu Larochellechef de service du Théâtre des Eskers, à Amos. La situation a cependant permis de mettre de l’avant les artistes régionaux et d’offrir des productions plus nichées, faisant découvrir de nouvelles avenues au public. 

 

S’il s’efforce d’offrir l’accueil le plus chaleureux possible, Mathieu admet que l’ambiance n’est pas la même et que l’expérience client est grandement affectée. Le théâtre est loin de remplir sa fonction d’espace de socialisation, pourtant majeure.

 

Au Rift, malgré les efforts déployés pour rester présents auprès de la population, Amélie reconnaît que la fermeture prolongée au printemps et la diminution de la fréquentation des salles ont affaibli le lien avec le public et entraîné d’importantes pertes financières. Elle rappelle qu’en faisant vivre la culture au Témiscamingue, le Rift agit comme un acteur essentiel d’attraction et de rétention de la population, il est donc primordial qu’il reste en santé. Elle et les membres de son équipe redoubleront d’efforts pour demeurer très actifs dans les prochains mois.  

 

LE CAS PARTICULIER DE L’AGORA DES ARTS 

 

À l’Agora des Arts de Rouyn-Noranda, aucune programmation officielle n’a été présentée cet automne. Bien que le lieu puisse recevoir des productions, Réal Beauchamp, directeur général et artistique, souligne que très peu de produits culturels circulent présentement. Il s’inquiète par ailleurs pour la survie financière des compagnies de création qu’il accueille habituellement entre ses murs, si la pandémie vient à s’éterniser.  

 

Pour l’institution qui se consacre principalement à la création et à la diffusion de théâtre de niche et pour les jeunes, la pandémie a eu un effet inattendu. Alors qu’on s’apprêtait à lancer de grandes rénovations attendues depuis plusieurs années, le coût des travaux s’est avéré beaucoup plus élevé que prévu en raison des conditions sanitaires à respecter sur les chantiers et du coût accru des matériaux. Il s’agit d’un enjeu de taille puisque les travaux sont urgents et essentiels à la survie de l’établissement: « La bâtisse a 90 ans. On opère dans des conditions très minimalistes [] Présentement, la salle est fonctionnelle, mais pour la survie de l’organisme, il faut que ça devienne une véritable salle. » 

 

Pour parvenir à concrétiser le projet, M. Beauchamp a demandé une majoration de la subvention offerte par le gouvernement provincial, qu’il a obtenue. La même démarche est en cours auprès du gouvernement fédéral, mais la réponse tarde à arriver. Malgré tout, M. Beauchamp reste confiant. Selon lui, l’absence de réponse de la part du fédéral n’est pas représentative d’un manque de volonté pour soutenir le projet, mais seulement de contraintes financières qui devraient se résorber en 2021. De plus, le soutien de la population s’est fait ressentir alors que 700personnes ont signé une pétition en appui à l’Agora des Arts et que 75 organismes ont signé des lettres de soutien.  

 

PLACE À 2021 

 

Alors qu’Amélie, Réal et Mathieu planchent sur leur programmation de 2021, les défis demeurent importants. Par exemple, avec les jauges réduites, il est difficile de faire venir des artistes d’envergure, ceux-ci préférant attendre de se produire dans des salles pleines.

 

Malgré tout, chacun prévoit une offre complète. Au Rift, Amélie souligne le retour de la Biennale internationale d’art miniature, alors qu’à l’Agora des Arts, Réal perçoit un intérêt des milieux scolaires pour assister à des spectacles jeunesse. Mathieu attend impatiemment l’automne 2021, espérant que les jauges lui permettront alors la mise en place une programmation aussi festive qu’il l’imagine. D’ici là, Amélie invite la population régionale à profiter de l’accès aux salles de spectacles qui représentent des lieux très sécuritaires dans les circonstances.