La pénurie d’enseignants qui sévit partout dans la province a récemment été au centre de l’actualité, alors qu’à l’aube de la rentrée 2020, Québec calculait un manque à gagner d’au moins 360 enseignants dans les écoles primaires et secondaires. Dans la région, l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT) a choisi, depuis quelques années déjà, de faire face à la situation en mettant en place diverses solutions pour combattre la pénurie. L’Indice bohémien s’est entretenu avec le professeur Réal Bergeron, directeur de l’Unité d’enseignement et de recherche en sciences de l’éducation et membre fondateur du Groupe régional d’acteurs pour la valorisation des enseignants (GRAVE) afin d’en savoir davantage. 

Selon M. Bergeron, à l’UQAT, on a vu venir la pénurie d’enseignants dès le milieu des années 2000. Si le nombre d’admissions dans les programmes d’éducation au préscolaire et d’enseignement au primaire s’est maintenu, on a constaté une baisse marquée dans les programmes de formation à l’enseignement secondaire. Aujourd’hui, le manque de main-d’œuvre en général est criant, alors que les centres de services scolaires de la région et de partout au Québec engagent de la main d’œuvre non-légalement qualifiée pour pallier les besoins en suppléance, entre autres. Sur ce plan, en particulier, l’UQAT a appelé ses étudiants en renfort : « On a libéré les étudiants une journée par semaine, le vendredi, pour pouvoir répondre au besoin de suppléants, et cette action est très appréciée des centres de services scolaires », constate M. Bergeron. Cette solution permet aussi aux étudiants d’acquérir une expérience-terrain supplémentaire en plus de celle réalisée lors de leurs stages en milieu scolaire. Cependant, l’appel aux étudiants pour faire de la suppléance est parfois un couteau à double tranchant : « Bien qu’on ait libéré les étudiants les vendredis, souvent, ils sont appelés pendant la semaine pour faire de la suppléance; on constate alors un taux d’absentéisme dans nos cours. Ça, c’est beaucoup moins intéressant”, déplore M. Bergeron. 

Malgré tout, l’UQAT parvient à se démarquer grâce à des solutions uniques et novatrices, comme l’offre, partout au Québec et même hors Québec, du certificat en accompagnement à l’enseignement primaire, qui vient outiller les suppléants. Depuis 2017, les cours sont offerts en ligne et ainsi largement accessibles. Cet automne, l’UQAT a enregistré environ 400 nouvelles admissions dans ce certificat tout à fait unique au Québec. 

DE L’IMPORTANCE DE LA VALORISATION

Pour M. Bergeron, il y a un lien direct à faire entre la pénurie actuelle et la valorisation du métier d’enseignant. C’est ce sur quoi travaille actuellement le GRAVE, qui a mené l’an dernier une vaste étude auprès d’acteurs du milieu d’éducation en Abitibi-Témiscamingue et au Nord-du-Québec pour obtenir des données précises sur les enjeux touchant l’attraction et la rétention des enseignants, entre autres. M. Bergeron souligne par ailleurs le caractère exceptionnel et particulièrement bénéfique de la collaboration constante entre les différentes institutions régionales liées au milieu de l’éducation. « C’est un peu ce qui fait notre marque de commerce en Abitibi-Témiscamingue, le fait de travailler en partenariat avec le milieu scolaire et les syndicats, le Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue, ce qui n’est pas le cas dans d’autres régions ». Il souligne qu’il règne entre les différents acteurs un réel climat d’écoute et de collaboration, ce qui fait du partenariat avec les milieux scolaires et le syndicat, notamment, une solution gagnante pour lutter contre la pénurie. Cette lutte devra se poursuivre encore sans doute dans les prochaines années, mais le milieu de l’éducation peut heureusement compter sur l’UQAT et le GRAVE pour continuer d’innover.