Les cinq textes sur le Prix littéraire des collégiens ont été rédigés par des étudiants du programme Arts, lettres et communications du Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue, sous la supervision de madame Stéphanie Hébert.

« Longtemps, pendant mon enfance, quand j’étais plantée devant la télévision, ma mère pouvait s’approcher sans que je détecte sa présence. Elle devait alors répéter mon nom trois ou quatre fois avant que je revienne à ce qu’elle nommait “la réalité”. »

Depuis l’invention de la télévision au XXe siècle, la frontière entre le réel et la fiction est de plus en plus mince, et c’est là-dessus que Karoline Georges s’interroge dans De synthèse. Dans ce roman, une narratrice sans nom, à la fin d’une carrière de mannequin, s’isole afin de poursuivre sa quête vers la création de l’image parfaite, représentée par Anouk, son avatar numérique. Cependant, la mort imminente de sa mère la force à quitter son monde virtuel afin de réintégrer la réalité. Cette intrigue est habilement servie par un groupe restreint de personnages – une jeune femme et ses parents – mais percutants. Même si ceux-ci pourraient paraître antipathiques en raison de leur détachement, voire de leur froideur, leurs défauts servent bien la réflexion sur les relations humaines. Cette œuvre d’anticipation traite donc non seulement de technologie et de rapports entre l’humain et l’image, mais aussi de famille et de liens mère-fille qui se heurtent à de nombreuses barrières, autant réelles qu’immatérielles.

Dans un style ciselé, le récit se compose de plusieurs temporalités d’abord séparées, mais qui se rejoignent afin de concilier passé, présent et futur. Cependant, De synthèse brille avant tout par sa manière d’aborder lucidement la relation avec la fiction et les images que peut avoir quelqu’un ayant grandi les yeux rivés à la télévision. L’auteure évite toutefois de se faire moralisatrice, préférant soulever des questions plutôt que de donner des réponses. Sa vision de la technologie, optimiste tout en demeurant réaliste, trahit d’ailleurs un niveau de compréhension élevé de la façon dont nous interagissons avec celle-ci.

Tous ces éléments font de ce livre une lecture extrêmement intéressante, abordant des questions universelles que se pose l’humanité par rapport à sa propre évolution et à la façon de survivre à la souffrance. Ils permettent au lecteur de s’infiltrer, à travers les mots, dans un monde d’images.


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