Le film Hochelaga, terre des âmes a été choisi pour représenter le Canada dans le processus de nomination à la prestigieuse cérémonie des Oscars dans la catégorie « Meilleur film en langue étrangère » et c’est Samian, originaire de Pikogan, qui porte le film sur ses épaules.

Samian, qui signifie Samuel en langue algonquine, est né à Pikogan, près d’Amos en 1983. Métis algonquin, c’est lui que le réalisateur François Girard a choisi pour incarner son personnage principal, Baptiste Asigny, un archéologue mohawk qui remontera la ligne du temps.

« François m’a appelé et voulait me rencontrer. Nous avons pris un café, j’étais à la veille de partir en vacances. Il m’a dit écoute mon film Le violon rouge et lis ensuite ce scénario et dis-moi ce que tu en penses. J’ai lu le scénario comme on lit un roman… c’est une très belle poésie », raconte Samian.

Lorsque son avion s’est posé au Japon, Samian a contacté le réalisateur. Pas question de passer à côté du projet.

« C’est une fresque historique profonde comme on l’a jamais vue au Canada », décrit-il. Le film se déploie sur 750 ans d’histoire d’un jeune Canada et de ses origines anciennes, le tout raconté par un archéologue. Si la trame demeure une fiction, l’ensemble frôle la réalité de très près, selon Samian.

En fait, la fiction, selon l’acteur, c’est l’emplacement même du site d’Hochelaga. Dans le film, un affaissement de terrain se produit au stade Percival-Molson de Montréal. La partie de football qui s’y tient est interrompue et l’endroit est converti en site archéologique protégé. Baptiste Asigny, l’archéologue incarné par Samian, y entreprend des fouilles qui révèlent des secrets enfouis sous des siècles d’histoire, et même sur ses propres origines.

« Une des premières questions de François a été de me demander : “toi, comme métis algonquin, est-ce que ça te dérange de jouer un métis mohawk?” Je n’y voyais pas de problème. Et en fait, il n’y a pas de controverse dans ce film. Hochelaga a été le plus gros village iroquoïen de l’époque et les Français côtoyaient beaucoup les Algonquins », précise le comédien.

Samian ajoute que le Hochelaga : terre des âmes sera aussi une œuvre pédagogique grâce à de nombreuses références historiques avec le concours de l’archéologue Baptiste Asigny, qui porte l’aboutissement de 10 années de recherches. Le long métrage permet aussi d’entendre à l’écran des passages en algonquin, en mohawk, en français et en anglais, ce qui reflète la diversité linguistique et culturelle.

« On découvre que notre histoire est très métissée », prend-il soin de souligner.

À la barre du film, le réalisateur François Girard n’a rien d’un néophyte et ceux qui ont apprécié ses réalisations passées auront un intérêt certain pour ce film. M. Girard possède une longue feuille de route et a su s’imposer sur la scène internationale, notamment en 1998 avec Le violon rouge, qui avait remporté un Oscar. Il a également réalisé Soie, en 2007, et La Leçon (Boychoir), en 2014, mais c’est la première fois qu’il entre dans le processus de nomination aux Oscars avec un film fait au Québec, et par surcroit, sur sa propre ville.

« Son premier choc culturel, il l’a vécu ici, au Canada, avec les Premières Nations. Il se trouve qu’en faisant un film sur Montréal, il a découvert ses propres racines autochtones », a révélé Samian, qui ajoute avoir lui-même éprouvé un sentiment particulier et personnel lors du tournage de ce film.

« Je joue deux rôles dans Hochelaga. Je joue Baptiste Asigny, l’archéologue, mais aussi son propre ancêtre dans une scène de 1267. C’est un massacre iroquois, sur l’ile des Morts. Il y a un seul guerrier qui se relève et je l’incarne », décrit-il comme un évènement particulier et chargé d’émotions.

Histoire réhabilitée ou réconciliation?

« Certains ont parlé de réconciliation, mais ce n’est pas forcé. Disons que c’est une plateforme de plus. Je le vis beaucoup par la musique et dans mon quotidien avec les écoles où mes textes sont enseignés de secondaire 2 à secondaire 5 », mentionne Samian.

Artiste aux talents diversifiés, Samian souligne que les mots et les images commencent véritablement à incarner quelque chose lorsqu’ils échappent à leur créateur.

« Quand on crée un film ou une chanson, quand ça ne nous appartient plus, c’est parce que les gens ont décidé eux-mêmes de le prendre », illustre-t-il.

Le film Hochelaga, terre des âmes, produit par Roger Frappier, sera présenté en clôture du Festival de cinéma international de l’Abitibi-Témiscamingue et fera son apparition en salles en janvier 2018.

 

« Travailler avec François Girard fut l’une des plus belles expériences de ma vie et sa vision de notre appartenance à cette terre des Premières Nations jusqu’à nous est en quelque sorte prémonitoire de tout ce que nous vivons en ce moment. Je suis très content, ce film sera maintenant aux côtés des meilleurs films de la planète », a déclaré le producteur dans un communiqué. 

Pour ce qui est des nominations officielles pour la soirée des Oscars, Hochelaga, terre des âmes

a franchi une première étape sur trois. L’Academy of Motion Picture Arts and Sciences n’accepte qu’un seul film par pays pour la catégorie « Meilleur film en langue étrangère » et révèlera à la mi-décembre une courte liste de neuf films sélectionnés. Puis, le 23 janvier 2018, les cinq finalistes retenus seront révélés en vue de la 90e cérémonie des Oscars, qui aura lieu le 4 mars 2018.


Auteur/trice

Lise Millette est journaliste depuis 1998, tant à l'écrit qu'à la radio. Elle a également été présidente de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ). En Abitibi-Témiscamingue, elle a été rédactrice en chef de L'Indice bohémien en 2017 et depuis, elle continue de collaborer avec le journal.