Dans le documentaire Pour nous chez nous, le réalisateur rouynorandien Dominic Leclerc pose un regard à la fois critique et empreint d’espoir sur les avenirs possibles de nos économies locales. Produit par Lustitia Productions et diffusé à Télé-Québec, le film transporte le public au cœur de la gestion des ressources naturelles québécoises par une série de portraits industriels (sur l’eau, les pêches, les forêts, les mines et l’agriculture). Il nous amène ainsi à mieux comprendre les rouages économiques faisant obstacle à la transition socioécologique. 

LA FINANCIARISATION DE L’ÉCONOMIE 

Pour nous chez nous part du constat que nos sociétés modernes sont de moins en moins autonomes dans leur capacité à combler les besoins de base des citoyennes et citoyens. Le documentaire met en cause la perte de la propriété collective des ressources naturelles, exacerbée par la financiarisation de l’économie. « On a perdu le sens de manger ce qui fait partie de chez nous. Face à cette offre qui nous vend tout, on oublie de regarder ce qu’il y a autour », affirme le réalisateur. 

La réalité de l’exploitation des forêts est particulièrement éloquente pour comprendre la situation. Dominic Leclerc explique : « Les compagnies forestières ont des garanties d’approvisionnement. Ce sont des lots de forêt qu’elles ont le droit de couper. Pour une institution financière, ça a une valeur. C’est comme une hypothèque payée. En acquérant une usine, les compagnies peuvent emprunter, et on n’a aucune idée de ce qu’elles font avec cet argent-là. » Selon lui, ce modèle limite la volonté des entreprises de modifier leurs pratiques productives : « Elles font de l’argent avec leurs activités financières. C’est pour ça qu’elles perpétuent le modèle, sans trop réfléchir à s’améliorer. » Pour nous chez nous montre à quel point les secteurs primaires québécois fonctionnent tous selon ce modèle. L’accaparement des terres agricoles par des intérêts étrangers est un autre exemple de cette réalité.  

L’AUTONOMIE LOCALE COMME SOLUTION DE RECHANGE 

Malgré le caractère inquiétant des enjeux traités, Pour nous chez nous se garde de verser dans le défaitisme : « Tout au long du film, on voit des gens qui sont des inspirations, à l’image des solutions. En allant aux Îles-de-la-Madeleine [pour aborder l’enjeu des pêches], j’ai vu l’insularité comme une façon de concevoir le développement régional. La solution à la globalisation, c’est de réfléchir l’économie localement. De penser en insulaires. » Dans cette perspective, nos milieux se retrouveraient-ils cloisonnés? « L’insularité, ce n’est pas de se fermer au monde. Réfléchissons avec ce qui nous entoure : les arbres, les plantes, les humains… Peut-on avoir une économie à cette échelle-là, et communiquer avec les autres îlots, qui ont leur propre économie? Je l’aime, cette vision-là. Je la vois possible. Je trouve qu’il y a quelque chose de beau », affirme le réalisateur, rempli d’espoir. 

Le documentaire Pour nous chez nous sera présenté à Vues du Québec, festival du cinéma de Florac 2023 en France, alors que la région de l’Abitibi-Témiscamingue est à l’honneur. Dominic Leclerc y présentera plusieurs œuvres, notamment Les chiens-loups, Alex marche à l’amour et le film Culturat. 


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