Je vous écris une histoire en ce début d’automne. Il y a trois personnages dans ce récit : un grand-père nommé Sylvain, son fils André et la fille d’André, Aglaé.

La scène se passe un après-midi de récoltes en famille. Il pleut un peu et des mésanges volent tout autour. Le temps se fait doux malgré tout. Le fils a 38 ans, il se vante d’être climatosceptique. Pour lui, les rumeurs de réchauffement de la planète viennent d’écologistes et de scientifiques « fêlés ». Son père Sylvain est sans mots face aux convictions de son garçon. Cela le trouble, d’autant plus que celui-ci a trois enfants.

André donne l’exemple du jardin dont la récolte devrait être plus importante avec une température plus chaude. « On n’a pas plus de légumes que quand j’étais petit », argue-t-il. C’est le genre de preuves sur lesquelles il s’appuie pour refuser de faire son compost, de marcher ou faire plus de vélo, d’utiliser moins de plastique et de récupérer tout ce qui peut l’être. Pire, il refuse d’accorder à sa fille, Aglaé, 15 ans, la permission de manifester le 27 septembre prochain pour demander aux gouvernements d’agir pour sauver la planète. Une grève générale pour le climat est appelée cette journée-là. Aglaé se décourage de son père, mais peut compter sur son grand-père Sylvain qui, à 69 ans, comprend ce qui se passe et s’en inquiète, tout comme elle.

Cet après-midi-là, alors que la famille ramasse les légumes du jardin et les transforme pour l’hiver, le ton monte une autre fois entre les deux hommes. À un moment, le paternel prend son fils par le bras et l’amène vers sa voiture sans dire un mot.

« Regarde », lui dit-il. « Regarde quoi? » répond André. « Regarde le pare-chocs de ma voiture. Nous sommes allés à Montréal aller-retour et dans les Laurentides pendant l’été. On a fait plus de 2 000 kilomètres. » « Et puis? » reprend le fils d’un air moqueur. « Il n’y a presque pas d’insectes écrasés. Avant ta naissance, dans les années 1970, on sortait du parc La Vérendrye avec le pare-chocs noir de cadavres d’insectes. Ils disparaissent! On dit même qu’une espèce d’insecte sur dix est menacée d’extinction. »

Un fait aussi évident ne convainc pas celui qui voue une admiration sans bornes au président américain. Son père croit que le sujet le fait paniquer, qu’André a peur et préfère nier le problème plutôt que de l’affronter comme sa fille désire le faire.

Mon histoire s’arrête ici.

Le 27 septembre prochain, un mot d’ordre de grève mondiale est donné. J’invite les personnes qui lisent cette chronique à y participer du mieux qu’elles le pourront. Il s’agit d’un mouvement nécessaire qui va aller en grossissant.

Car si Sylvain, son fils et Aglaé sont des personnages inventés, le réchauffement de la planète est, quant à lui, réel. Nous avons la responsabilité de faire tout ce que nous pouvons pour renverser sa vapeur.


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