Martin Luther King avait un rêve. Dans un des grands discours du siècle dernier, à Washington, au cœur du pouvoir politique américain, il lançait :

« Nous ne pourrons jamais être satisfaits tant que nos enfants seront dépouillés de leur identité et privés de leur dignité par des pancartes qui indiquent : “Seuls les Blancs sont admis.”Je rêve que mes quatre petits enfants vivront un jour dans un pays où on ne les jugera pas à la couleur de leur peau, mais à la nature de leur caractère. Je fais aujourd’hui un rêve! »

Une évidence : pouvoir aller partout et être jugé pour sa valeur et ses compétences et non sa peau. Lui, Rosa Parks et Mandela ont tous lutté contre le racisme et la discrimination. Il fallait faire disparaître ces quartiers pour les Noirs, ces écoles, ces sections de restaurants, ces places dans les bus, ces toilettes publiques réservées, ces fontaines.

De drôles de choses arrivent aujourd’hui, ici, aux États-Unis ou en Europe, et elles n’ont rien à voir avec le rêve de Luther King. On voit de plus en plus apparaître des sessions de formation, des camps, des cours universitaires (!) réservés aux personnes racisées, nouveau concept, pour parler des victimes de racisme. Des concerts ou des festivals, comme le Festival Nyansapo, à Paris en juillet, qui comptait 80 % des espaces qui n’étaient ouverts qu’aux femmes noires. À Montréal, un colloque pour gens d’affaires noirs. Le pasteur King se retournerait dans sa tombe. C’est le retour de certains ghettos, de zones, d’événements, selon la couleur de la peau. Blacks only, whites only, comme au fond du Mississippi dans les années 1950.

Un article de Radio-Canada, du 31 janvier, était titré : Les employés du secteur public québécois sont trop blancs. Pas trop compétents ou trop gâtés, non. Trop blancs. Il est dit que Québec s’était engagé à avoir une fonction publique qui reflétait la composition de la société, et les choses ont beaucoup changé depuis 2001 et la dernière mise à jour.

La discrimination positive, les quotas, les copiés-collés ne fonctionnent pas. Par essence. Ils sont fondamentalement discriminatoires pour un autre groupe, quel qu’il soit. Malgré la bienveillance de plusieurs derrière ces mesures, il reste que le choix se fait selon la couleur de la peau. Et la compétence? Le caractère, comme dirait Luther King? La démographie fera le travail et on ne peut mettre des milliers de personnes à la porte.

Je nous croyais tous québécois pourtant. L’est celui qui veut l’être et qui partage nos valeurs cardinales. Il n’y a pas, il me semble, de Québécois noirs, jaunes ou beiges. Il n’y a que des Québécois à qui on offre une liberté de choix, et les meilleures chances possibles, par notre système d’éducation et de solidarité sociale.

Depuis un an, on parle de racisme systémique. L’antiracisme organise lui aussi, paradoxalement, un système qui ramène comme définition première d’un individu la couleur de sa peau ou la forme de ses yeux. On croit rêver!


Auteur/trice

Abitibien d’adoption, Valdorien depuis 20 ans, Dominic Ruel est enseignant en histoire et géographie au secondaire. Il contribue à L’Indice bohémien par ses chroniques depuis les tout débuts, en 2009. Il a été président du CA de 2015 à 2017. Il a milité en politique, fait un peu de radio, s’est impliqué sur le Conseil de son quartier et a siégé sur le CA du FRIMAT. Il aime la lecture et rêve d’écrire un roman ou un essai un jour. Il est surtout père de trois enfants.