De nos jours, les déchets sont au cœur des questions environnementales. Au Québec, ce sont environ 13 millions de tonnes de déchets qui sont générés chaque année1. Ça en fait de la matière ! Nos sociétés continuent d’associer le déchet à une image négative, à la saleté, au danger et à la putréfaction. C’est pourquoi chaque personne s’empresse de le mettre dans une poubelle et de le faire sortir de son quotidien en l’envoyant au loin dans les bennes à ordures puis les décharges. Pour leur part, des artistes ont su voir dans ces déchets une nouvelle ressource possible, de nouvelles matières à exploiter et à transformer.

Définir un déchet n’est pas facile. C’est un objet (ou un morceau d’objet) qui n’existe plus, puisqu’il meurt. Il perd son utilisation et sa vocation première dès lors qu’il devient un déchet. Utiliser les déchets dans l’art, c’est redonner une vie et une vocation à ces matières.

Dés le début du XXe siècle, des artistes ont su magnifier et sublimer le déchet pour en faire sortir de la poésie, de l’ironie, ou tout autre message qu’ils veulent transmettre grâce à leur art. Les premières réutilisations d’objets ont commencé avec Picasso, Braque et André Breton. Cela est maintenant devenu commun dans le monde de l’art, comme le démontrent des artistes contemporains connus internationalement tels que Vik Muniz2, Jane Perkins et Arman. Ces nouvelles générations d’artistes dotés d’une forte conscience écologique réutilisent des objets de toutes sortes et les font ainsi rentrer dans un nouveau cycle de vie. La question se pose alors : où est la limite de la valorisation et du recyclage ? Est-ce que l’artiste a empêché la matière d’être valorisée et remise dans le cycle de vie ? Car la plupart du temps, les œuvres sont immortelles, elles sont vouées à perdurer dans le temps, donc à ne plus être recyclées de façon responsable. Cependant, il va de soi qu’il est préférable de réutiliser des objets que d’en acheter des neufs ; et l’œuvre aura su faire passer un message. Utiliser les déchets et les objets perdus, c’est montrer qu’ils sont encore là et qu’ils sont parfois bien plus nombreux qu’on ne l’imagine. Cette forme de conscientisation de la population apporte souvent des images bien plus percutantes que de simples discours.

Donner une seconde vie aux objets et à la matière est aussi une source d’inspiration pour des artistes de la région. L’Abitibi-Témiscamingue regorge d’artistes qui utilisent les matières recyclées dans leur art : Véronique Doucet avec Requiem Humaniterre, Jacques Baril avec ses sculptures de métal recyclé ainsi que Christian Bourgault, pour n’en citer que quelques-uns…

Prenons quelques minutes pour nous laisser porter par ces œuvres et pour nous poser des questions sur notre (sur)consommation. L’exposition Apparence trompeuse de Jose Luis Torres se termine au Centre d’exposition de Rouyn-Noranda alors que l’exposition Tableaux Noirs de Véronique Doucet commence à Ville-Marie etvient confronter notre société avec la nature.