Vous savez ce qu’est une activité brise-glace ? On utilise souvent cette technique lors de la première rencontre d’un groupe. Dès le début, la personne chargée d’animer propose une affaire bizarre comme imiter son animal favori. Cela sert à « dégeler » le climat et rendre les gens plus à l’aise après s’être dévoilés un peu.

Le hasard ou un incident quelconque peuvent avoir le même effet. Ils transforment un évènement dont l’évolution était prévue de tous et bouleversent l’ordre établi. Les lignes toutes droites de nos vies bien rangées se mélangent soudainement. Nos quotidiens, réglés au « quart de tour », s’humanisent et prennent des couleurs…

Il en a été ainsi le 24 décembre dernier. Une panne de courant est venue illuminer la soirée de centaines de personnes. Beaucoup ont pris les moyens du bord et se sont rassemblées autrement afin de passer le réveillon. Le lendemain, les réseaux sociaux abondaient en belles histoires de solidarité. Cela prouve que tout n’est pas perdu, qu’il n’y a pas que des assassinats en vue. Il y a autre part où porter nos regards.

Un autre exemple est advenu le 6 mai à Rouyn-Noranda. Nous sommes en pleine série finale de la Ligue junior majeure du Québec, un vendredi soir. Plus de 3 600 personnes sont présentes à l’aréna ! Une partie de hockey de ce type est un gros spectacle. Tout y est organisé : le réchauffement des équipes, l’entrée des joueurs sur la patinoire, l’hymne national, la musique, les entractes, etc. Le rythme est conçu pour qu’on se centre sur le jeu.

Or, voilà qu’avant le début de la deuxième période, un tuyau de réfrigération, placé sous la glace, est percé par accident. La saumure se met alors à gicler sur la patinoire et le personnel de l’aréna déploie tous ses efforts à réparer le bris.

Dès que la foule comprend que plus rien ne se passera sur la patinoire avant un bout de temps, des rumeurs folles voyagent dans les gradins. Elles concernent les causes du problème et la suite des choses. Puis, on fait la vague, siffle et applaudit un préposé venu mopper le dégât. Tout le monde parle et se laisse porter ; les enfants courent, les parents sourient, les langues se délient. Jamais je n’aurais cru être ainsi ému et nous trouver aussi beaux pendant une partie de hockey.

Mais c’est qu’il n’y a plus de partie. Notre glaçage de spectateurs a fondu… À l’annonce du report de la joute, une heure plus tard, tout le monde a quitté sans rouspéter.

Je me plais à croire qu’il peut en être ainsi à tous les instants de la vie. Une crevaison donne naissance à un couple, un groupe de personnes déterminées entraine de profonds changements sociaux, un rêve fou s’enracine dans notre argile. Tout est possible. Tout se peut surtout lorsque nos glaces disparaissent.

Voici venue la saison où l’eau se libère et où les feuilles jasent. Cette saison où nous sortons de nos cocons et où les possibles fleurissent. L’air étant maintenant doux et chaud, il ne reste qu’à dégeler nos esprits pour vivre un bel été ! \


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