Ce numéro de L’Indice bohémien paraît à quelques jours du Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue. Depuis trois décennies, le dernier samedi d’octobre est étroitement associé à la soirée d’ouverture de cet événement et nul besoin de préciser de quel festival il s’agit, cela s’entend… Ce rituel bien enraciné, celui de l’écran qui s’anime au cœur de la saison la plus grise de l’année, vient ponctuer nos automnes, comme d’autres rituels viennent rythmer d’autres saisons. Chaque temps de l’année est généreux de quelque chose, le moment est venu de cueillir, en formule concentrée, ce que le cinéma a de bon à nous offrir.

De cinéma, il en sera bien sûr question dans ce numéro, celui qui se fait ici principalement. Cette cuvée régionale 2010, qui se retrouve à l’écran du festival, retient l’attention avec six premières mondiales. Ce cinéma, il parle de nous (Voir Ali, Opasatica, Noire sœur, Les fros) mais il nous fait aussi franchir des frontières (Malawi, Jayan V), celles des pays, du temps, de l’imaginaire, des sentiments, de la connaissance, de l’autre. De la connaissance de l’autre. Comme le feront aussi les quelque 150 courts, moyens et longs métrages de cette 29e édition.

Ce numéro de novembre fait place à de nouvelles chroniques. Johanne Pelletier, une Québécoise nouvellement arrivée dans la région, nous livre des extraits de la correspondance qu’elle entretient avec ses parents et amis depuis qu’elle s’est installée au bord de son lac abitibien.


Martine Savard inaugure un nouvel espace, Signature d’artiste, qui se veut une invitation lancée aux artistes pour qu’ils nous parlent de différents aspects de leur métier. Ariane Ouellet, pour sa part, s’intéressera, dans les prochains numéros, aux projets
d’intégration des arts à l’architecture, autant d’œuvres qui sont inscrites dans notre espace public et que nous avons tout intérêt à découvrir.

L’Indice bohémien transporte dans ses mots et entre ses lignes l’énergie créatrice de ces artistes inspirés et l’ardeur contagieuse de ces travailleurs culturels et bénévoles qui orchestrent les rendez-
vous auxquels le public est convié, à cœur d’année. Pour que, de l’un jusqu’à l’autre, le courant passe, dans tous les sens et en sollicitant tous nos sens. Parce que l’espérance dans la culture vient du ventre autant que de la raison, comme l’écrivait si justement Margot Lemire dans un commentaire lu récemment sur facebook.

Avec l’événement AT@MTL qui bat son plein à Montréal, la pratique artistique de l’Abitibi-Témiscamingue s’exporte et, parions-le, séduit. Guy Lemire faisait de la culture une question d’identité à définir et d’appartenance à exprimer envers ce terri-toire que nous habitons depuis à peine cent ans. Les artistes y trouvent leur inspiration et y façonnent leur vision du monde. Et quand il se trouve des personnes pour retrouver un peu d’elles-mêmes dans toutes ces formes d’expression auxquelles elles ont accès, quand des sensibilités se connectent l’une à l’autre à travers une musique, un dessin ou un film, un petit miracle se produit. Maïka (10 ans) l’a bien compris, avec ce regard d’enfant qu’elle nous livre dans la chronique La culture dans mes mots : Je considère que l’art est une manière de parler sans les mots de tous les jours (…). Les artistes trouvent le moyen d’exprimer ce qu’ils ressentent et savent comment faire pour que les gens qui reçoivent leurs œuvres comprennent.

L’automne cédera bientôt sa place à l’hiver, puis ce sera le printemps et, enfin, l’été. Nous aurons traversé ces saisons en nous réchauffant à des expositions éclairantes et des scènes éclairées, des guitares du monde dansantes, des légendes contées, des livres nourriciers, des documenteurs ratoureux, des musiques classiques et d’autres émergentes, et de tant d’autres choses encore.

La vie qui bat au rythme des saisons et de la culture, dans un milieu créatif et ouvert, où l’on se sent bien et dans lequel on se reconnaît, est-ce cela l’art de (bien) vivre ?


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