Le Festival de cinéma international en Abitibi-Témiscamingue (FCIAT) a 40 ans cette année. Pour les plus jeunes, il a toujours fait partie du paysage culturel abitibien. Pour les plus vieux, qui l’ont vu naître et grandir, il est un objet de fierté et d’appartenance.

40 ANS : UN FESTIVAL À VIE ET À GRANDEUR D’HOMME!

Le FCIAT a toujours été un gage de succès et le résultat de plusieurs mois de labeur acharné. Sa popularité le démontre bien. Cependant, Jacques Matte, l’un des membres fondateurs et le directeur du Théâtre du cuivre, me confiait récemment que le festival a bien grandi, depuis ses débuts, et que les erreurs passées ont parfois été rocambolesques! On apprend de nos bourdes, et certaines font de meilleures anecdotes que d’autres! En effet, avant que le Festival ait l’erre d’aller qu’on lui connaît aujourd’hui, il a parfois fallu user d’ingéniosité, de débrouillardise ou d’audace pour régler quelques situations particulières!

LES PREMIÈRES ANNÉES : LA FOLLE JEUNESSE DU FCIAT

Au milieu des1980, alors que Philippe de Broca présente son film Louisiana, dans lequel joue sa femme de l’époque, Margot Kidder (la première Lois Lane des franchises Superman), l’équipe du FCIAT organise une conférence de presse pour l’occasion, dans un bar de Montréal. Or, la réalité dépasse vite la fiction, mais surtout les attentes et l’organisation! L’actrice, alors des plus populaires, a convié moult journalistes, pour la plupart anglophones et peu connus de l’équipe de festival. Chacun réclame 5 minutes avec elle, mais le temps manque terriblement. Les locaux débordent, les organisateurs sont médusés devant les proportions de la rencontre, et il faut attendre les entrevues et les projections à Rouyn pour offrir au couple un semblant de calme… mais pas de succès.

L’ADOLESCENCE TROUBLE

C’est l’année de la présentation d’Un zoo la nuit (1987), de Jean-Claude Lauzon, que le festival connaît une nouvelle aventure. Après un succès phénoménal à Cannes, Lauzon quitte les journalistes de Toronto en furie : il en a assez du cirque médiatique. Il acceptera cependant de venir présenter son film à Rouyn-Noranda, mais sans journalistes. Il s’initie plutôt à la chasse au faisan avec Claude Lelouche, Jean-Claude Labrecque, Jacques Matte et festoie sur les berges du lac Témiscamingue. Lauzon était un être à part, confie M. Matte. Un génie artistique un peu à la Nelligan : une étoile filante et solitaire.

LA VIE DE JEUNE ADULTE

C’est grâce à Robert Charlebois que Gainsbourg est venu promouvoir Stand the flasher, film qu’il a scénarisé et produit en 1990. Le chanteur chouchou du Québec a fait le relais entre son ami français et l’équipe du FCIAT. Après avoir réussi à venir jusqu’à Rouyn, en avion, sans fumer (!), Gainsbourg offre aux journalistes le spectacle qu’ils attendaient. Il les rencontre un à un et donne un numéro exceptionnel. Si Gainsbourg est l’homme timide classique qui se pavane derrière un rôle de grand excentrique, il envoute la galerie. Il reçoit les journalistes au whisky, qu’il boit à peine, sans qu’on s’en aperçoive. Il peut ainsi défendre son projet, un film un peu plus difficile, et gagner la visibilité nécessaire.

LA PLÉNITUDE DE LA QUARANTAINE

Le FCIAT a vécu de grands moments cinématographiques, journalistiques et humains. Il a su vaincre toutes sortes d’épreuves, et il se démarque encore, malgré la multitude d’évènements de cinéma qui existent depuis la création de notre festival. Dans l’univers cinématographique, le festival occupe une place très importante et internationale. Il a vu naître les Jean-Marc Vallée et Denis Villeneuve au travers de leurs courts métrages, et il a aussi eu sa part de premières internationales. Bien que les émissions culturelles disparaissent tranquillement, la popularité du FCIAT ne semble pas en souffrir. Le public, fidèle depuis 40 ans, a appris à évoluer avec l’offre des films. Les films sous-titrés, d’abord reçus avec un certain scepticisme, sont maintenant totalement appréciés du public. Aussi, les activités entourant le festival permettent à de nouveaux publics de s’initier aux films étrangers, ce qui assure un renouveau constant chez les spectateurs. Ainsi, tout le réseautage que les membres du festival ont pu bâtir depuis ces années porte ses fruits : on réserve au FCIAT des primeurs, des films exclusifs, bref, des évènements à la hauteur des premiers rêves du trio bâtisseur.

LE TEMPS DES RÉCOMPENSES

Si le festival propose quelque 150 films et décerne des prix dans 7 catégories chaque année, il en reçoit aussi, des distinctions. Depuis 1985, il a obtenu 24 prix, gages de l’excellent travail de l’équipe derrière l’évènement : prix de la Chambre du commerce de Rouyn-Noranda, Prix d’excellence en arts et culture de l’Abitibi-Témiscamingue, Grand Prix du tourisme québécois, Mention du festival Rendez-vous du cinéma québécois à Montréal, médaille de l’Assemblée nationale, doctorat honoris causa remis par l’UQAT, etc. Les prix sont aussi variés que mérités. Et sans la grande famille du festival, qui inclut les membres fondateurs, les membres du conseil d’administration, le personnel, les bénévoles (et le public!), rien ne serait pareil. Après tout, il y a plus d’une génération qui a côtoyé le FCIAT!

Bon festival!


Auteur/trice

Après avoir enseigné le français, le théâtre et la littérature au Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue, Gabrielle Demers oeuvre dans le domaine de la pédagogie universitaire. Elle s’adonne aussi à la performance, aux installations artistiques et aux arts imprimés. Elle se questionne sur les enjeux actuels liés à la féminité dans l’espace public, entre autres.