Richard Kistabish, ce grand homme modeste, vient d’être nommé comme l’un des trois experts du continent nord-américain d’un groupe formé par l’UNESCO. Proclamée Décennie des langues autochtones en 2019 par l’ONU, 2022-2032 sera employée à « appeler l’attention sur la catastrophe que représente la disparition des langues autochtones ».

Voilà une occasion pour Richard Kistabish de défendre l’anicinabemowin, la langue ancestrale qui a bercé son enfance et dont il se fait le diplomate. Il souhaite ainsi défendre et revitaliser cette clef qu’est la langue pour un peuple. Cet outil de connexion et de communication doit reprendre sa place pour restaurer l’harmonie collective, explique-t-il, même si le sujet de l’accessibilité aux ressources et du territoire reste entier.

Pour lui, s’engager dans cette mission a été un parcours : en plus d’assumer des responsabilités auprès de sa communauté d’Abitibiwinni et de son engagement politique en tant que grand chef du Conseil tribal de la nation algonquine Anishinabeg, il a travaillé pendant 19 ans à la Fondation autochtone de l’espoir afin de recueillir des témoignages de survivants des pensionnats dont il fait partie. Il a milité auprès de différentes provinces, parfois ouvertes, parfois réticentes, pour que, grâce à l’instruction et la pédagogie, l’héritage anicinabe demeure vivant en étant enseigné dans les écoles.

Il a finalement choisi de porter la voie de la langue et de la culture en cofondant Minwashin, qui signifie beau en anicinabemowin. Avec cet organisme qui a pour mandat de promouvoir la culture et la langue, M. Kistabish veut faire « petit et beau ». Il n’est pas toujours nécessaire d’utiliser de gros moyens pour promouvoir la langue. Depuis le calendrier en anicinabemowin jusqu’aux étiquettes à placer sur les objets du quotidien en passant par le réseau des radios communautaires, beaucoup de gestes portent déjà leurs fruits.

Minwashin fait aussi grand et beau comme avec l’événement Miaja, un rassemblement autour de la culture anicinabe dont la première a été un vrai succès en septembre 2019. Toutes les communautés anicinabek du Québec se sont rassemblées avec des experts autour de la revitalisation, de la valorisation et de la transmission du patrimoine, des arts et de la culture anicinabe.

Aujourd’hui, c’est une magnifique occasion qui fait rejaillir la fierté et la reconnaissance bien au-delà du local : en portant haut et fort à une échelle internationale ses couleurs et celles de tous ceux envers qui il s’engage, M. Kistabish s’autorise même à imaginer cette revitalisation dont il rêve pour sa langue natale. Selon ses mots, la langue n’est pas un projet ou une destination c’est une marche, une perpétuelle démarche quotidienne et aussi un processus. Et une partie d’un tout qui appelle à être réparé.

Richard Kistabish ne manque pas de courage et sait que trouver les ressources humaines et financières est toujours un défi, mais qu’une fois le cercle formé, la possibilité de répartir tâches, responsabilités et devoirs devient réelle.

Il appelle aujourd’hui tous ceux qui se sentent concernés à se rassembler autour de cette mission de sauver l’anicinabemowin et à l’accompagner dans l’effort.


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