Comment se sont passés votre été et vos vacances avec le port du masque, les deux mètres, le plexiglas dans les restos, les files et le Purrel? En fin de compte, nous avons eu une belle saison, très chaude et humide, qui nous a permis, malgré tout, de reprendre une vie un peu plus normale. Le confinement ne l’était pas. J’imagine qu’on a tous un peu triché avec la famille et les amis. Mentalement, ce sera bon pour tout le monde. Il faut maintenant reprendre nos habitudes, le travail, l’école, les loisirs avec des normes exceptionnelles. Nous sommes entrés dans un nouvel ordre sanitaire, dont nous ne voyons pas la fin à court terme.

Nos vies quotidiennes et nos relations avec les autres sont et seront désormais régies par un seul principe : la santé. Santé physique, j’entends. Nous nous croiserons masqués, nous limiterons encore nos rencontres, les rassemblements majeurs sont interdits, on vit à distance bien souvent. Cette santé n’a pas eu de prix : 340 G$ de déficit au fédéral, un chômage qui a triplé, les gouvernements n’ont pas hésité à provoquer la pire crise économique en cent ans. Toute la société a payé pour protéger les plus vulnérables.

Il faudra aussi travailler sur la santé mentale et la santé sociale, qui ont subi les contrecoups du confinement et de la crise économique qui s’est ensuivie. C’est pour cela que le retour physique en classe pour les enfants et les ados est si important. Le gouvernement a proposé un plan qui, je crois, est bien équilibré entre sécurité et efficacité pédagogique. Ce sera un peu plus de gestion pour tous, mais ça permettra aux jeunes de revivre une scolarité plus normale. La bonne nouvelle : ce masque que l’on pourra enlever en classe. Les vrais rapports humains ne se font pas masqués. Ils se font à visage découvert.

Cet ordre sanitaire provoque aussi de grandes divisions. Le feu est pris sur les réseaux sociaux. Avec le confinement, l’arrêt des activités et les arcs-en-ciel dans les fenêtres, nous pensions que le Québec sortirait grandi et uni. Quelque chose comme un grand peuple! On s’est trompé solidement! Pro-masques et anti-masques, pro-rentrée scolaire et partisans de l’école à distance, anxieux paranoïaques et convaincus réalistes, libertaires et nostalgiques du KGB, on se chicane sans fin. La santé est devenue l’axe autour duquel on catégorise les bons et les méchants, les connaisseurs et les complotistes. Et ce terme est peut-être trop utilisé, devenu une insulte ad hoc. Je ne parle pas de la 5G, du vaccin à puces, de Bill Gates ou d’une dictature qui s’installe. Mais j’espère qu’on peut encore s’interroger sur certaines mesures sanitaires, qu’on peut encore regarder les chiffres quotidiens et relativiser, qu’on peut réagir au traitement médiatique de toute cette crise. C’est de la santé intellectuelle, tout aussi importante.

Ce Québec sanitaire peut durer un temps, on peut le comprendre, mais ce n’est pas nécessairement celui dans lequel je veux vivre et que je souhaite pour mes enfants. Il faudra revenir au 12 mars 2020.


Auteur/trice

Abitibien d’adoption, Valdorien depuis 20 ans, Dominic Ruel est enseignant en histoire et géographie au secondaire. Il contribue à L’Indice bohémien par ses chroniques depuis les tout débuts, en 2009. Il a été président du CA de 2015 à 2017. Il a milité en politique, fait un peu de radio, s’est impliqué sur le Conseil de son quartier et a siégé sur le CA du FRIMAT. Il aime la lecture et rêve d’écrire un roman ou un essai un jour. Il est surtout père de trois enfants.