Tu attends cette période depuis longtemps déjà. Depuis ton retour de vacances, peut-être? Enfin l’occasion de retrouver ceux que tu chéris, de prendre du temps avec eux sans trop perdre ton souffle. Revoir les amis, les parents, jouer dehors avec les enfants. Un temps béni pour sortir du neuf à cinq et te reposer un peu, histoire d’oublier que tu ne te reposes pratiquement jamais…

Peut-être aussi la crains-tu profondément cette époque de l’année. Parce que tu anticipes de rencontrer à nouveau la solitude alors que tous, ou presque, fêteront ensemble, mais toi, non. La joie n’est pas aussi contagieuse qu’une fausse nouvelle dans le climat actuel. Celui qui attise les peurs et refroidit nos instincts sociaux.

Possible aussi que tu penses aux heures nécessaires à pourvoir les postes vacants dans le commerce où tu travailles. Tu songes avec effroi aux foules affolées, nerveuses et fatiguées, qui prennent d’assaut les caisses enregistreuses. Ce temps des fêtes qui joue de ta patience avec descartes de crédit… Tu en sortiras à bout de forces et de sourires polis.

Elles sont toutes commerciales, les fêtes. Toutes. Aucune n’échappe à ce dérèglement de nos priorités, surtout pas la plus importante : celle du solstice d’hiver. Elle qui devrait juste annoncer le tranquille retour de la lumière. Nos réalités se tordent sous une tension mercantile dirigée. La publicité pointe sans arrêt l’entrée des sites commerciaux. Un besoin presque inassouvissable de combler des désirs sans fin… L’amour, sous nos lumières superficielles, se déforme comme l’image de nos visages renvoyée par les boules accrochées aux sapins artificiels. 

Et, à cette période-ci de nos vies, je te pose une question. Elle me vient comme un murmure, une prière : et pourquoi pas juste du réel pour Noël?

Marcher dehors pour fouetter nos esprits engourdis. Sentir le froid nous mordre comme la nature croque dans la vie. C’est l’hiver tout de suite, maintenant. Juste du réellement.

Déblayer une entrée. Inviter des étrangers. Offrir un repas, courir dans les bois, prendre soin de toi. Nous serrer dans nos bras! Dire le nécessaire, prendre le temps de l’écouter… Cesser de se gaspiller. Rire, chanter, faire l’amour, pelleter une cour. Ne rien compliquer.

Pas d’écrans radieux ou de téléphones clairvoyants… Enweille, juste du réel pour Noël!


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