Les télévisions communautaires sont des médias nécessaires à la santé démocratique. Elles donnent une voix à la population et son image est dépendante des projets et visions de la communauté. De plus, elle est facilement accessible et offre une programmation différente et près de son public. Les enjeux et le fonctionnement de chaque télévision communautaire varient considérablement d’une ville à l’autre. Alors que Rouyn-Noranda et Val-d’Or misent sur l’évolution constante de sa programmation, le Témiscamingue travaille sous le signe de la nouveauté qui fait boule de neige.

 

La directrice de TV Témis, Chloé Beaulé-Poitras, et ses collègues ont pris la relève il y a trois ans d’une télévision communautaire qu’elle qualifie de conventionnelle, qui faisait des couvertures médiatiques ainsi quelques productions locales à bas budget.

 

Arrivés avec un vent de fraîcheur, ils ont soutenu la vision que TV Témis est une télévision qui peut visuellement mettre en valeur leur territoire. « Veux, veux pas, quand tu es jeune et que tu reviens en région, c’est comme si la place était libre parce que les gens sont contents et aiment le renouveau. Nous avons eu un gros appui de la population et des partenaires du milieu. »

 

Il faut préciser que ce grand changement est tombé pile au moment où le plan culturel numérique a été lancé, un heureux hasard. Le plan culturel numérique vise à mettre sur pied de nouveaux sites Web. La technologie de celui de TV Témis datait de 2007, le site faisait donc partie de la liste des sites ayant un besoin prioritaire de renouvellement. À l’époque, la station a été une des premières télés au Québec à diffuser en simultané sa programmation 24 heures sur 24. Avec le nouveau site Web mis en ligne le 21 septembre, les émissions vont mieux être mises en valeur et les choses vont se mettre à débouler. « Les gens sont éblouis de notre travail, mais le fait que nous soyons arrivés au bon moment n’est pas à négliger », énonce Mme Beaulé-Poitras.

 

« À l’ère des médias numériques, le potentiel est immense. Ayant déjà les studios et le matériel, il est plus facile de créer de la nouveauté. La station a une base solide, il ne suffit que de regarder devant et produire des émissions de qualité, mais le bon fonctionnement demande beaucoup de temps et d’argent. » Mme Beaulé-Poitras développait son point, expliquant qu’en calculant les coûts de production et en exposant publiquement les résultats de ces calculs, il est facile, par exemple, de démontrer à la communauté la valeur d’une série de 8 émissions qui aurait exigé 700 heures de travail et d’ainsi raviver sa relation avec le milieu. « Les gens ont toujours eu cette conscience-là au Témiscamingue, l’importance d’avoir un média télévisuel indépendant est établie. Nous nous distinguons aussi par le fait que nous n’avons que très peu de couvertures médiatiques télévisuelles : les gros joueurs ne se déplacent pas chez nous pour les faits divers. Nous n’avons pas de compétition. Notre radio et notre journal sont complémentaires. »

 

Du côté de Rouyn-Noranda et de Val-d’Or, la place grandissante du Web aide entre autres à trouver des collaborateurs. Isabelle Luneau, directrice de TVC9, croit que nous ne sommes pas à la fin de ce virage. « Nous devons nous renouveler pour attirer les gens à la télé. Tout est une question d’accessibilité. Ce qu’on veut faire ressortir cette année, c’est la diversité : de tout, pour tous les goûts. Notre gros enjeu est de recruter des gens qui souhaitent faire de la télévision, car nous réalisons les projets de la communauté. TVC9 peut démarrer un projet, mais ce n’est pas la majorité de notre programmation. Nous devons rencontrer la population pour faire notre développement et trouver des gens qui ont un intérêt envers le média. Il faut dire que c’est aussi un investissement de temps : ça rend la tâche plus compliquée. Nous sommes bien contents d’avoir tous nos collaborateurs actuels. Ce sont leurs idées que nous mettons en image : c’est un travail d’équipe. »

 

Malgré les succès que vit TV Témis, l’équipe demeure quand même réaliste. Il y a du travail à faire au niveau du développement. Il faut démontrer l’accessibilité de la télé à la population. « Ce vent de changement nous permet de développer. La MRC travaille d’ailleurs avec nous dans le projet de L’anecdote agricole et son support de financement a permis de mener à bien cette émission en faisant la promotion de l’agriculture. Elle a aussi joué un rôle de coordination en faisant des démarches pour trouver d’autres partenaires. Notre relation avec les différentes télévisions communautaires de l’Abitibi est excellente. Nous fournissons du contenu témiscamien et elles n’ont pas besoin de se déplacer. En plus, nous en retirons des revenus. Si nous voulons atteindre notre vision, il va falloir profiter de nos ramifications et creuser davantage », conclut la directrice de TV Témis.

 

Avec la multiplication des canaux de diffusion, la télévision a davantage sa raison d’être afin de se reconnaitre et de s’informer d’un point de vue régional et local. Elle se niche dans un contenu unique dans lequel les gens s’identifient. Afin de garder le cap, elle doit à la fois être à l’écoute de la population et oser faire différent. Il s’agit de garder cette dynamique fragile, la fine ligne entre la stabilité et l’innovation : la constance motrice. \


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